Les fondamentaux – Chapitre 6 – Notions de radioprotection

G. Bonardel et J.-F. Chateil

 

Plan du chapitre

  • Fondements de la radioprotection
  • Mise en œuvre pratique de la radioprotection
  • Informations à délivrer aux patients
  • Conclusion

 

Objectifs

  • Connaître les fondements de la radioprotection.
  • Mise en œuvre pratique : justification, optimisation, exposition professionnelle dans le cadre de l’imagerie médicale.
  • Savoir quelle information délivrer au patient.

Fondements de la radioprotection

La radioprotection correspond à l’ensemble des mesures mises en œuvre pour se protéger des effets néfastes reconnus ou potentiels des rayonnements ionisants (RI). En médecine, ces mesures concernent tout d’abord les patients et les personnels exposés professionnellement, et s’étendent également au public et à l’environnement. En plus de la gestion du risque physique, la radioprotection s’attache également à prendre en compte la dimension psychologique pour ne pas entretenir l’anxiété liée à l’exposition aux RI mais, au contraire, la diminuer.

Nature et effets des rayonnements ionisants (RI)

Les RI sont des rayonnements d’énergie suffisante pour éjecter un électron de l’orbite électronique d’un atome. Il existe des RI naturels et artificiels, ces derniers étant utilisés en médecine soit à titre diagnostique, soit à titre thérapeutique. Ils sont électromagnétiques dans le cas des photons X ou γ, alors de masse nulle (utilisés respectivement en radiologie et en médecine nucléaire), ou particulaires lors de l’émission de corpuscules de masse non nulle : rayonnement β+ (utilisé en tomographie par émission de positons [TEP]), β– ou α (utilisés en médecine nucléaire à visée thérapeutique – radiothérapie vectorisée). Les autres techniques de radiothérapie font appel à des rayonnements puissants (photons de haute énergie, électrons, protons) focalisés pour détruire une tumeur.

L’énergie générée par les RI peut entraîner des modifications de la matière vivante, au niveau cellulaire où ces rayonnements sont susceptibles d’induire des lésions, notamment de l’acide désoxyribonucléique (ADN). Ces effets sur l’organisme varient en fonction de la dose reçue et de différents facteurs : la source (activité ou intensité de fonctionnement, nature, énergie), le mode d’exposition (temps, débit) et la cible (tissus ou organes touchés, âge de l’individu – les enfants étant plus vulnérables –, radiosensibilité individuelle).

Il existe deux types d’effets des rayonnements ionisants (figure 6.1) :

  • les effets précoces (déterministes) sont dus à l’effet physique de l’irradiation et sont la conséquence de la mort cellulaire induite par le rayonnement. Ils sont quantifiables en fonction de la dose absorbée (voir plus loin). C’est l’effet qui est recherché en cancérologie lors de l’emploi de la radiothérapie. Ils apparaissent toujours au-delà d’une dose-seuil connue (qui dépend de l’organe et n’est pas inférieure à 300 mSv) et leur gravité augmente avec la dose reçue. Ils peuvent engager le pronostic vital en cas d’irradiation globale et peuvent avoir des conséquences fonctionnelles lourdes en irradiation partielle (alopécie, brûlures). Seules la radiologie interventionnelle (acte thérapeutique guidé par l’imagerie) et la radiothérapie interne vectorisée en médecine nucléaire exposent le patient à des doses suffisantes pour créer un risque déterministe. Le traitement des lésions tardives (fibrose, cataracte) étant difficile et peu efficace, il faut donc tout mettre en œuvre pour les prévenir, par la connaissance et le respect des doses limites, ce qui nécessite une dosimétrie précise lors des gestes réalisés ;
  • les effets tardifs (aléatoires ou stochastiques) sont liés à des mutations ponctuelles radio-induites de l’ADN et peuvent aboutir à la survenue d’affections malignes. Le risque de survenue est apprécié à partir de l’impact biologique supposé, exprimé en sievert (Sv). Le délai d’apparition après l’exposition est de plusieurs années. Une tumeur radio-induite n’a pas de signature particulière reconnue : absence de marqueur biologique permettant de différencier, par exemple, un cancer pulmonaire dû au tabac d’un cancer pulmonaire radio-induit. La probabilité d’apparition d’un cancer radio-induit est fonction de la dose de l’irradiation, selon une relation linéaire au-dessus de 100 mSv, mais elle est très débattue pour les doses plus faibles.
Figure 6.1 Effets déterministes et effets stochastiques en fonction de la dose.
Figure 6.1
Effets déterministes et effets stochastiques en fonction de la dose.

Grandeurs et unités utilisées en dosimétrie, radiobiologie et radioprotection

Les unités employées en radioprotection dérivent du système international (SI). Il est important de savoir utiliser l’unité pertinente pour chaque grandeur mesurée.

Grandeurs physiques : reflet des interactions physiques des RI avec la matière

  • La dose absorbée est la quantité d’énergie délivrée par un rayonnement par unité de masse de tissu ; elle s’exprime en gray (1 Gy = 1 J/kg).
  • L’activité d’un radionucléide est le nombre de transitions nucléaires spontanées par seconde, avec émission d’un rayonnement ionisant. Elle est mesurée en becquerel (Bq ou s–1). L’activité spécifique d’une substance correspond à l’activité par unité de quantité de matière : celle du corps d’un adulte de 140 Bq/kg, celle de l’eau de mer de 12 Bq/L et celle du granit de 7000 Bq/kg.

Grandeurs dosimétriques : évaluation du risque pour la santé des RI

Les grandeurs dosimétriques se classent en deux familles :

  • d’une part, les grandeurs de protection qui sont la base des limites imposées par les textes réglementaires, notamment pour la protection des travailleurs, de la population générale. Elles ne sont pas directement mesurables et reflètent le préjudice pour la santé du fait d’une exposition interne et/ou externe aux RI. Elles comprennent :
  • la dose équivalente à l’organe, qui correspond à la dose reçue par un organe pondérée d’un facteur d’efficacité biologique du rayonnement selon sa nature (photons, électrons, neutrons, etc.) ;
  • la dose efficace sur le corps entier qui est calculée par une pondération sur les différents organes pour tenir compte de leurs sensibilités différentes aux rayonnements. Le Sievert (Sv) est l’unité de mesure utilisée en radioprotection pour mesurer l’effet d’un rayonnement sur un organisme vivant. Cette unité permet donc de comparer l’effet d’une même dose délivrée par des rayonnements de nature différente à des organismes, des organes ou des tissus qui n’ont pas la même sensibilité aux rayonnements.
  • d’autre part, les grandeurs opérationnelles, permettant d’avoir des unités simples à utiliser lors de la pratique quotidienne : en radiodiagnostic, on utilise des grandeurs dosimétriques spécifiques telles que le produit dose × surface (PDS) pour l’imagerie de projection, qui s’exprime en mGy·cm2, l’index de dose scanographique (IDS ou computed tomography dose index [CTDI]) qui tient compte du profil de coupe en tomodensitométrie (TDM ou scanner) sans refléter la dose totale reçue par le patient, cette dernière étant exprimée par le produit dose × longueur (PDL) qui permet de représenter l’exposition en affectant la dose au volume exploré ; le PDL s’exprime en mGy·cm. PDS et PDL permettent, en prenant en compte les organes exposés, de calculer ou d’estimer la « dose efficace », elle-même exprimée en Sv.

Épidémiologie des effets en rapport avec les RI

Rappelons tout d’abord que l’exposition aux RI s’effectue dans un contexte d’exposition globale de la population humaine. Cette exposition se distingue habituellement en deux sources dont les effets s’additionnent :

  • l’exposition naturelle (ensemble des sources extérieures à toute activité humaine et existant indépendamment de celle-ci : irradiation cosmique, tellurique et corporelle) estimée en moyenne à 2,9 mSv par an en France ;
  • et l’exposition artificielle, très largement liée à l’activité médicale, qui est d’environ de 1,6 mSv par an et par individu. Il ne faut pas oublier que la dose cumulée annuelle pour un individu donné varie en fonction des situations d’exposition (lieu d’habitation, modes de vie, tabagisme, etc.) et peut, de ce fait, être inférieure ou très supérieure à cette valeur moyenne. L’exposition artificielle a augmenté durant les dernières décennies, notamment en raison du développement des explorations par TDM.

Les études épidémiologiques ont montré avec certitude que le risque de cancer augmente de manière significative chez les personnes ayant reçu une dose de RI supérieure à 200 mSv. Les RI à forte dose et débit de dose élevé ont un effet cancérogène indubitable, mais relativement faible par rapport aux autres cancérogènes naturels ou artificiels, ce qui rend difficile leur individualisation dans une population donnée, en sachant que le risque de cancer global « vie entière » est actuellement estimé à 25 % dans la population générale. Les effets sur le génome, éventuellement transmissibles à la descendance, ne sont pas établis chez l’être humain et sont probablement négligeables par rapport au nombre d’altérations génétiques spontanées.

Pour les faibles doses, à l’heure actuelle, les effets sur la santé humaine d’une exposition à des doses inférieures à 100 mSv font l’objet de débats scientifiques. C’est d’ailleurs pourquoi cette valeur de 100 mSv a été choisie pour définir schématiquement le domaine des « faibles doses ».

Une relation linéaire décrit convenablement la relation entre la dose et l’effet cancérogène pour les doses supérieures à 200 mSv (suivi des grandes populations irradiées par les bombes atomiques en 1945). Bien que ce risque n’ait été véritablement démontré et accepté par l’ensemble des chercheurs que pour les fortes doses, il est considéré, par principe, que les effets stochastiques peuvent survenir après toute irradiation, même si ce risque n’est véritablement démontré que pour les fortes doses. En radioprotection, pour estimer l’ordre de grandeur du risque encouru par les travailleurs et dans une optique sécuritaire maximale, un modèle volontairement pessimiste, dit de « relation linéaire sans seuil » (RLSS), est utilisé. Il donne la certitude de ne pas sous-estimer ce risque, s’il existe. Cette RLSS constitue un risque plafond utilisé à des fins de radioprotection pour les travailleurs exposés, mais elle ne peut en aucun cas être utilisée pour calculer la probabilité d’induction d’effets stochastiques des faibles doses dans la population générale.

En dehors des procédures de radiologie interventionnelle, les doses délivrées par la plupart des examens radiologiques et de médecine nucléaire excèdent rarement 10 mSv. Les expositions subies par les travailleurs ou les personnes habitant les régions où l’irradiation naturelle est élevée sont également de cet ordre. Le seul risque à prendre en compte en imagerie médicale diagnostique, pour le patient (toujours faibles doses < 100 mSv) et pour le personnel ou le public (très faibles doses < 10 mSv), concerne donc essentiellement le risque aléatoire de cancérogenèse radio-induite, même si ce dernier est actuellement essentiellement théorique.

Mise en œuvre pratique de la radioprotection

L’amélioration continue de la protection radiologique des professionnels et du public a permis de constater ces dernières années que les personnes les plus exposées dans notre société étaient maintenant les patients.

La transposition en droit français des directives européennes, en particulier la dernière en date (directive 2013/59 Euratom) fixant les normes de base relatives à la protection sanitaire contre les dangers liés à l’exposition aux RI, a modifié de façon importante la prise en compte de la radioprotection dans la pratique médicale. Ces modifications portent sur la radioprotection des patients et des personnels, la réglementation de la conception et de l’installation des locaux et des dispositifs utilisant des RI, ainsi que sur les procédures de contrôle de qualité ; il a également été instauré une obligation de formation initiale et continue pour tous les utilisateurs de RI, applicable à tous les médecins, justifiant ce chapitre dans cet ouvrage.

L’usage des RI dans le domaine du diagnostic médical ne peut se voir appliquer de limites réglementaires individuelles pour la dose, car le bénéfice qu’il apporte est très supérieur au risque qu’il peut engendrer, à condition que l’examen soit justifié et d’une qualité suffisante pour le diagnostic, introduisant ainsi les grands principes régissant la radioprotection dans le domaine médical.

Le premier de ces principes, la justification des examens d’imagerie, consiste à établir le bénéfice net d’un examen par rapport au préjudice potentiel lié à l’exposition aux RI. Pour permettre son application, le Code de la Santé Publique stipule « qu’aucun acte exposant aux RI ne peut être pratiqué sans un échange préalable d’information écrit entre le demandeur et le réalisateur de l’acte. Le demandeur fournit au réalisateur les informations nécessaires à la justification de l’exposition demandée dont il dispose. Il précise notamment le motif, la finalité, les circonstances particulières de l’exposition envisagée, notamment l’éventuel état de grossesse, les examens ou actes antérieurement réalisés ». Le Guide du bon usage des examens d’imagerie médicale (gbu.radiologie.fr) édicté par la Société française de radiologie (SFR) et la Société française de médecine nucléaire (SFMN), sous l’égide de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) et de la Haute autorité de santé (HAS), constitue un document support important pour la mise en œuvre de ce principe. La connaissance des indications des principaux examens d’imagerie en fonction de la situation clinique est fondamentale pour tout médecin. L’application du principe de justification doit également tenir compte d’une possible substitution par un examen non irradiant, telles l’échographie ou l’IRM, en cas de performance diagnostique égale.

Le deuxième principe concerne l’optimisation des pratiques par l’opérateur utilisant les RI. Celle-ci consiste à réaliser un acte irradiant en utilisant la dose la plus faible possible pour une performance diagnostique ou thérapeutique maximale, pour maintenir la dose à un niveau aussi bas que raisonnablement possible selon l’acronyme anglais ALARA (as low as reasonably achievable). L’optimisation s’applique pour l’ensemble des patients et des examens irradiants, en particulier pour les jeunes enfants compte tenu de leur plus grande radiosensibilité. L’application de ce principe passe par l’obligation de maintenance et d’assurance de qualité des matériels, l’obtention d’un diplôme attestant du suivi d’une formation à la radioprotection des patients et la prise en compte des niveaux de référence diagnostique (NRD) ; ces derniers ayant pour but de décrire l’exposition observée pour les examens les plus courants et de permettre à chacun, par comparaison, une évaluation de ses pratiques. Il est obligatoire de stipuler, dans le compte-rendu d’examen d’imagerie, tous les éléments nécessaires à l’évaluation de la dose délivrée au patient : PDS en radiographie standard ou interventionnelle, PDL en TDM en précisant le champ exploré, nature du radiopharmaceutique et activité injectée en médecine nucléaire.

Le troisième principe concerne les personnels professionnellement exposés et fait appel au contrôle et à la limitation des doses reçues. Chaque professionnel doit être conscient de son environnement technique et responsable des personnels qui l’accompagnent. Se protéger est un gage de sérénité autant qu’une obligation réglementaire. La démarche d’optimisation pour le patient bénéficie également directement aux personnels. Sur le plan réglementaire et dans le cadre de la médecine du travail, les personnels exposés aux RI bénéficient d’une réglementation propre aux lieux et conditions de travail ainsi que d’un suivi et d’une catégorisation professionnelle avec une limitation annuelle fixée à 20 mSv en dose efficace annuelle délivrée au corps entier pour la catégorie A et à 6 mSv pour la catégorie B. Dans le cadre de cette catégorisation, la dose maximale au public a été fixée à 1 mSv/an, alors même que l’irradiation naturelle moyenne en France se située entre 2 et 5 mSv. Enfin, nous rappelons que cette limitation de dose ne concerne pas les patients, pour lesquels le bénéfice attendu est très nettement supérieur au risque théorique.

Informations à délivrer aux patients

La population générale a un faible niveau de connaissances concernant les effets des RI et plus généralement les données scientifiques qui y sont rattachées. Dans le cadre du devoir d’information du patient, il faut rappeler qu’en imagerie médicale aucune procédure diagnostique n’atteint 100 mSv, ce qui signifie que ces procédures sont réalisées dans une plage de doses pour laquelle aucun effet déterministe n’est usuellement attendu. L’augmentation « à la marge » de l’incidence de cancers pour une exploration donnée reste très discutée, issue de modèles statistiques présomptifs ou portant sur des données d’études rétrospectives épidémiologiques souvent de type « cas-témoin » d’interprétation parfois difficile.

Il convient avant tout de rassurer les patients et leurs familles en ne faisant pas l’amalgame entre risques réels et risques supposés, et en centrant cette information sur la balance bénéfices (avérés objectifs des RI en médecine)/risques (théoriques des RI aux faibles doses).

La connaissance des doses efficaces moyennes délivrées par tel ou tel examen comme rappelées dans le Guide du bon usage des examens d’imagerie médicale et surtout leur comparaison avec les niveaux d’exposition naturelle annuelle (2,9 mSv en France, variant dans le monde de 1 à 150 mSv – Inde, Iran) permettent de relativiser concrètement l’exposition médicale et son niveau de risque (tableau 6.1).

Tableau 6.1 – Exemples de doses efficaces délivrées

Radiographie des poumons

20 μSv

Vol transatlantique

50 μSv

Irradiation naturelle moyenne en France/an

2,9 mSv

Scintigraphie osseuse

5 mSv

TDM abdominopelvienne

10 mSv

Limite d’exposition des travailleurs/an

20 mSv

Seuil au-delà duquel les effets stochastiques sont prouvés

200 mSv

Seuil de myélotoxicité

1 Sv

Seuil de toxicité digestive

5 Sv

Seuil d’apparition des radiodermites

10 Sv

Seuil de neurotoxicité

20 Sv

Dose d’une radiothérapie ciblée sur une tumeur

50 Sv

Ordres de grandeur de doses efficaces délivrées et seuils de tolérance : ces doses, valables en 2021, varient en fonction des appareils et des réglages et sont susceptibles d’évoluer avec les progrès techniques.

Prendre garde aux unités : μSv, mSv, Sv permettant de prendre de la mesure des « échelles de dose ».

En médecine nucléaire diagnostique, où le patient va émettre lui-même pendant quelque temps de très faibles doses de RI en rapport avec le radiopharmaceutique injecté, aucune mesure d’éviction particulière n’est recommandée pour l’entourage et les sujets contacts, y compris les enfants en bas âge et les femmes enceintes, les doses cumulées étant toujours très inférieures à 1 mSv, et très souvent équivalentes à celles délivrées par l’irradiation naturelle de certaines régions sur quelques jours.

En radiologie interventionnelle, les patients doivent être informés de la nécessité d’un suivi cutané, certaines procédures pouvant délivrer de fortes doses (3 Gy ou plus à la peau).

Enfin, la grossesse constitue un cas particulier tant il apparaît que la relation entre exposition médicale et grossesse est fortement empreinte d’angoisse et de subjectivité. Pourtant, comme pour les autres situations, la présentation objective des risques réels et des effets possibles permet d’éliminer toute forme d’angoisse à ce sujet en centrant le discours sur la balance bénéfices/risques. Il convient de rappeler que les malformations congénitales radio-induites relèvent des effets déterministes à seuil et ne peuvent pas survenir en deçà de 100 mSv, alors que le risque « naturel » de survenue d’une malformation congénitale est de 3 %. Cela n’empêche pas d’appliquer les deux grands principes de radioprotection que sont la justification et l’optimisation, tout particulièrement chez les femmes enceintes ou susceptibles de l’être. La période la plus radiosensible correspond à la phase d’organogenèse (7 à 60 jours de grossesse), pendant laquelle l’irradiation doit être particulièrement minimisée. La recherche préalable d’une éventuelle grossesse avant toute exposition aux RI, chez toute femme en capacité de procréer, est souhaitable par l’interrogatoire, voire par un dosage de la β HCG plasmatique si nécessaire. Une fois l’indication posée, l’optimisation et la connaissance de la dose délivrée permettent de donner à la patiente une information objective et rassurante.

Conclusion

Le champ de la radioprotection, qui n’incluait à l’origine que les travailleurs, s’est élargi au public puis aux personnes exposées pour raison médicale. Son concept global est exprimé de la manière suivante : assurer un niveau de protection adéquate pour l’homme, sans pénaliser indûment les pratiques bénéfiques exposant aux rayonnements ionisants (RI). Les mesures de protection ne doivent donc pas être disproportionnées par rapport au risque, ni limiter inutilement les activités bénéfiques pour l’individu ou la société. La radioprotection est constituée d’un ensemble d’éléments, scientifiques et objectifs, associant physique, biologie, réglementation et, avant tout, un certain état d’esprit, c’est-à-dire une préoccupation permanente associée à l’activité professionnelle. Cette préoccupation repose essentiellement sur des principes de justification des examens, d’optimisation des pratiques, notamment lorsque l’on a affaire à des femmes enceintes et des enfants en bas âge. Elle intègre une connaissance des bases élémentaires de physique et de radiobiologie permettant de relativiser le risque encouru, notamment en imagerie médicale diagnostique exposant le patient à de faibles doses de rayonnements, a fortiori les professionnels et l’entourage (pour l’imagerie nucléaire) à de très faibles doses. En effet, aux doses telles que celles délivrées par un seul examen d’imagerie médicale standard, aucun effet déterministe ne peut survenir et le risque stochastique de cancer radio-induit est infinitésimal, essentiellement spéculatif. La répétition et le cumul des explorations dans un intervalle de temps court ne doivent toutefois pas être négligés, la justification de chaque acte restant la pierre angulaire de la démarche médicale.

Essentiel à retenir

  • La connaissance des différentes unités Bq, Gy, Sv et de leur utilisation respective est essentielle.
  • Les effets biologiques se divisent en effets déterministes (radiologie interventionnelle, radiothérapie) et en effets stochastiques (carcinogenèse à long terme).
  • Les doses délivrées en imagerie diagnostique font partie des faibles doses, inférieures à 100 mSv, sans détriment sanitaire observé.
  • Les principes de radioprotection reposent en médecine sur la balance bénéfique/risque, déterminant la justification des actes, puis sur l’optimisation des pratiques.
  • L’information du patient est essentielle afin de lever toute angoisse inutile.
  • L’enfant et la femme enceinte doivent faire l’objet d’une attention particulière.
  • La radioprotection en milieu médical concerne également le personnel exposé.

 

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